La Maison Rouge propose avec "Sots Art - Art politique en Russie de 1972 à aujourd'hui" une exposition totalement indispensable que son directeur Antoine de Galbert avait repérée à la Galerie Nationale Trétakiov dans le cadre de la 2ème Biennale d'art contemporain de Moscou en mars 2007.
En effet, cette exposition concerne le premier mouvement original russe depuis les avant-gardes du début du 20ème siècle, créé en 1972, par deux artistes moscovites, Vitaly Komar et Alexandre Melamid qui baptiseront ce mouvement contestataire et anti-conformiste "Sots Art", contraction des mots "art" et "socialisme".
Le Sots Art, une fronde politique
Le Sots Art ne présente pas à l'origine les caractéristiques d'un mouvement artistique au sens classique du terme.
Il fédère des artistes autour d'un état d'esprit contestataire et libertaire, voire nihiliste, qui entreprend une lutte politique par le biais d'un anti art officiel.
Leur fonds de commerce, le détournement des images et des slogans de la propagande pour pratiquer un rire de résistance.
Détournements ludiques, utilisation jusqu'à l'absurde des slogans et de la rhétorique soviétique, caricatures et satire artistique, tous les moyens sont bons pour abattre une culture totalitaire par la voie de la subversion ironique.
Ainsi Leonid Sokov détourne le symbole de l'étoile rouge dans son "projet de lunettes pour les citoyens soviétiques", Alexandre Kossolapov érige un nouveau totem, une Trinité réunissant Lénine- Jésus- Mickey et détourne le ready made de Duchamp avec "la porcelaine révolutionnaire russe".< Rostilav Lebedev, avec ses portraits sans visages, "Chez nous, tout le monde peut devenir un héros" et Grisha Brouskine, avec ses personnages monumentaux en acier inoxydable, pervertissent les représentant des archétypes de l’iconographie soviétique.
Bien qu’un peu ratiboisée pour cause de censure à l’exportation, l’exposition parisienne comporte un grand nombre de tableaux, sculptures, photographies et vidéos et offre un vaste panorama d'un mouvement confidentiel qui accède à la notoriété avec la Pérestroïka.
Le Sots Art, un système plastique
Dans les années 90, le Sots Art devient un must esthétique. La chute du régime soviétique et l'implosion de l'URSS n'implique pas la disparition du Sots Art mais sa novation sous l'impulsion d'une nouvelle génération d'artistes pour qui la l'implication politique ne revêt pas la même dimension.
Les icones soviétiques intègrent le thésaurus artistique et la forme privilégie le fond.
Les figures emblématiques, comme le marin, et l'architecture soviétique sont utilisés pour leur signifiance formelle ("Marins et cieux" de Georgi Gourianov et "Le triomphe de l'Apollo" d'Alexeï Belayev-Gintovt.
Les insignes militaires deviennent des motifs décoratifs pour Sergei Miromenko.
L'iconographie de la peinture soviétique des années 30 inspire la créatrice de mode Olga Solidatova, dans une tendance similaire à celle constatée pour le cousin occidental qu'est le Pop Art.
Pour d'autres, ils génèrent une certaine nostalgie comme cette "Archéologie d'une ville utopique" de Vladimir Dubossarsky et Valery Koshliakov.
Le renouveau du Stots Art dans la création russe contemporaine
Le Sots Art rencontre un nouvel écho vital dans la création russe contemporaine.
C'est sur le terrain de la critique socio-politique que se placent des artistes provocateurs et actionnistes comme Oleg Kulik, le groupe des Blues Noses et Alexeï Kallima .
Une histoire à suivre donc...
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