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Ettore Scola  LCJ Editions juin 2016

Réalisé par Ettore Scola. Italie/France. Drame. 1h57 (Sortie 1981). Avec Bernard Giraudeau, Valeria d'Obici, Laura Antonelli, Jean-Louis Trintignant et Massimo Girotti.

Qui j’ose aimer.

Récemment jouée au théâtre du Châtelet, la comédie musicale "Passion", une composition de Steven Sondheim mise en scène par Fanny Ardant, est inspirée du film "Passion d’amour" d’Ettore Scola. C’est l’occasion rêvée de découvrir l’histoire atypique d’un grand amour malade.

"Toutes les familles heureuses se ressemblent", affirme Tolstoï à la première page d’Anna Karénine. "Et les amours heureuses sont sans histoires", ajoute Giorgio, le personnage principal du film de Scola. Le ton d’emblée est donné : vivre une passion, c’est avant tout souffrir et subir, comme le veut le sens premier du mot.

Le film ne sera donc pas le récit des amours heureuses de Giorgio et de sa maîtresse Clara dans l’Italie récemment unifiée du milieu du 19ème siècle. Les deux amants sont pourtant sublimes de jeunesse et de beauté, un couple parfait de cinéma incarné par Bernard Giraudeau et Laura Antonelli.

Bien vite, ils sont séparés. Giorgio doit rejoindre sa caserne loin de la ville où il se languit de celle qu’il aime. Il devient un intime du Colonel de la garnison, qui vit avec sa mystérieuse cousine, affligée d’un mal étrange qui la force à s’isoler.

Le beau jeune homme est curieux de cette Fosca qui se dérobe à sa vue. Jusqu’au jour où il fait enfin sa connaissance, et découvre qu’elle est d’une laideur repoussante. Mais la répulsion qu’elle inspire à Giorgio n’empêche pas Fosca de s’éprendre de lui férocement.

Combien d’héroïnes laides a-t-on pu voir au cinéma ? Fort peu, nous semble-t-il. La laideur est l’apanage traditionnel des personnages négatifs ; elle peut parfois échoir à la meilleure amie de la belle héroïne à qui elle ne fera ainsi pas d’ombre. On croirait presque que le personnage laid, parce qu’il ne provoque a priori pas le désir, en est lui-même dépourvu.

Or, ce que le film de Scola met en scène, c’est bien l’attirance irrépressible d’une femme laide pour un homme beau, désir que le manque de réciprocité ne fait qu’exacerber. Mais, et c’est bien là ce qui est dérangeant dans le film, la laideur est porteuse de mort, comme si elle avait aussi contaminé l’âme du personnage.

Conformément à l’idéal romantique, la mort est partout dans ce grand film d’amour. Le personnage de Clara était un personnage solaire, ses étreintes avec Giorgio, dans l’intimité d’une petite chambre, n’étaient que chaleur et lumière. Peu à peu, cet été s’efface et l’hiver gagne le film ; la pluie et la brume enferment les protagonistes dans un petit monde clos où les jours s’égrènent lentement.

L’univers décrit par Scola est marqué par un ensemble de rites, toujours répétés : les mêmes repas, avec les mêmes individus, parlant des mêmes sujets. La morne monotonie de la vie de caserne n’est brisée que par les hurlements de Fosca, explosions de vie venant de ce corps souffreteux.

Corsetée dans des vêtements sombres, voilée comme une veuve, Fosca porte le deuil de la vie que la beauté lui aurait offerte. Morte vivante réanimée par la passion, elle est filmée par Scola comme un vampire, une créature de la nuit aspirant à l’éclat du jour.

Ce n’est pas un hasard si le visage de Valeria D’Obici évoque irrésistiblement celui du Nosferatu de Murnau : même visage pâle, allongé, mêmes nez et doigts crochus, même bouche avide aux dents luisantes…

Epiant Giorgio en secret, caressant ses meubles comme une Reine Christine revenue d’entre les morts, elle se plaque contre les murs, elle se jette sur l’homme qu’elle aime, l’agrippe, le soumet peu à peu à sa volonté. Si ce vampire n’a pas soif de sang, mais d’amour, elle n’en porte pas moins la mort avec elle. Cette passion mortifère est associée à une maladie, qui contamine progressivement Giorgio et le dérobe au jour.

Les échos baroques du film viennent redoubler ce romantisme. Le cinéaste multiplie les signes de la Vanité - crânes, pendules - dont la présence indique le caractère irrémédiable du temps qui s’écoule et la mort. Jean-Louis Trintignant, docteur méphistophélique toujours entouré d’un nuage de fumée, est l’instigateur et le témoin de cette bizarrerie esthétique qui est le thème du film : l’alliance du beau et du laid, de la nuit et du jour, de la maladie et de l’amour.

 

Anne Sivan         
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