Comédie dramatique de Marguerite Duras, mise en scène de Philippe Sireuil, avec Edwige Baily et Jacqueline Bir.
Cette pièce légendaire (Madeleine Renaud-Bulle Ogier, Catherine Samie-Catherine Hiégel), bouleversante et vertigineuse, est reprise actuellement à l'Athénée.
Une jeune femme questionne une dame âgée qui a perdu sa fille et la mémoire. La mer lui a pris son enfant. La vie lui en dévore le souvenir.
Sujet simple, confrontation de deux univers, le metteur en scène Philippe Sireuil a choisi de revêtir chacune des protagonistes d'un imperméable neutre, la plus jeune laissant paraître un misérable pantalon de toile bleue, uniforme glaçant d'une époque uniforme, tandis que la vieille femme a des jambes, des escarpins, des danses, des bas.
La grande Jacqueline Bir - comédienne du Nord - incarne cette femme perdue et éperdue avec une émotion, un métier, une diction, une présence qui ne peuvent pas ne pas évoquer Edwige Feuillère ou Madeleine Robinson. Cette tragédienne fabuleuse tient la salle dans une main et chaque fil tendu résiste et vibre. Plusieurs visages baignés de larmes se cachèrent au salut.
Face à elle, Edwige Baily, petite Savannah suggérée, questionne comme une enfant butée, avec une réelle présence même si le profond théâtre de Louis Jouvet menace d'avaler certains mots trop chuchotés. Mais le petit roseau ne ploie jamais.
Marguerite Duras n'est pas hermétique : elle révèle. Marguerite Duras est drôle : ses propos sur les comédiens sont savoureux. Marguerite Duras aime les hommes : dans ce sable, il y l'Amant. Marguerite est maternelle, très "femelle" : mais à la manière rude de son institutrice de mère qui bravait le Pacifique.
Pour découvrir ce grand auteur classique, servi par deux excellentes comédiennes, il faut débouler à l'Athénée pour ce "Savannah bay" raz-de-marée. |