Depuis quelques années qu'on les surveille au télescope, on peut assurer que les toulousains de Novö ont un don pour rendre poétique les choses qui le sont le moins.
Il en fallait en effet, du talent et de l'audace, pour rendre sensible le titre de l'ouvrage du mathématicien Von Koch (Sur une courbe continue sans tangente, obtenue par une construction géométrique élémentaire, l'une des premières études de structure fractale, en 1904).
Déplaçant dans l'univers de l'intime, du tourment plus ou moins doux, la première moitié de ce programme géométrique, Novö ouvre soudainement l'aridité scientifique sur son opposé, un univers rock-pop synthétique et très nouvelle vague. Là tient tout le génie de la formation : d'oser faire l'union entre intellectualisme et sensibilité. L'union impossible de l'envers et de l'endroit ? On pourrait cette fois gloser sur le ruban de Möbius, volume à une seule face.
Depuis Je retiens ton souffle (Monopsone, 2007), le groupe s'est fait quintet. Il reste néanmoins dans la lignée d'un Diabologum pas tout à fait désabusé, d'un Telefax les pieds au sol. À ces influences il ajoute une touche très new-wave ("Garçon Triste"), confirme l'envie d'une écriture proche d'un Dominique A, d'un Jacno, d'un Fleurent-Didier, peut-être, toujours servi par la voix si distinctive de Jean-Michel Chabrel.
L'album respire comme s'étouffe le romantique languissant ; il fume certainement longuement en contemplant l'horizon, quand il ne courre pas sur un quai de gare, derrière des trains que l'on ne rattrapera jamais en en calculant la vitesse relative – tout juste en prévoira-t-on, peut-être, l'heure de collision avec celui qui est parti, quelques heures plus tôt, d'une autre gare, où l'on a laissé il y a longtemps un être aimé, presque oublié.
C'est lettré, racé, tourmenté – délicieux. |