Quand Shabazz Palaces sortait son premier album en 2011, le duo imposait au monde un esthétisme hip-hop expérimental de haut niveau. Piochant dans un free jazz décomplexé, tout autant que dans un rap apaisé et apaisant, Black Up dévoilait des trésors d’originalité. Il faut dire qu’avec une sacrée notion du groove, volontairement épileptique, empreinte de mysticisme et d’afro futurisme, l’album dévoilait une musicalité inédite.
De retour avec Lese Majesty, Ishmael et Tendai reprennent du service, armés jusqu’aux dents. Détruisant les formes standards du rap classique, les oreilles sont encouragées à se perdre dans des dédales de sons expérimentaux mâtinés de soul.
Souligné par un style futuriste chaotique, l’album apparaît vite comme un dédale inextricable, dans lequel refrain et couplets n’apparaîssent jamais à l’endroit convenu. C’est d’ailleurs une règle d’or pour le duo, qui met un point d’honneur à ne jamais suivre un chemin convenu. Ainsi, le single "Cake " balance ses claps entre rythmes industrialisés et percussions tribales 3.0 avant d'imposer une voix féminine comme contrepoint à un rap échevelé.
La recette rappellera sans doute celle de Black Up à ceci près qu'ici la cuisine brûle le palais tant avec chaleur que de par la variété de ses épices : on passe sans sommation des carillons mystiques de "Suspicion of a Shape" aux basses presque dansantes de "Noetic Noiromantics". Une diversité qui s'étend sur les 18 titres de l'opus, comme autant de possibilités musicales, de pistes exploitables, rapidement empruntées avant de se détourner vers une nouvelle forme musicale à triturer.
C'est avec une logique d'aventuriers et d'explorateurs que les deux artistes se sont lancés dans le projet Shabazz Palaces et dans cet optique Lese Majesty se devine comme un journal de bord. 18 pages, dont les récits s'ancrent fermement dans un futurisme elliptique et qui invitent au dépaysement avec une classe indomptable.
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