Réalisé par Asia Argento. Italie. Comédie. 1h40 (Sortie le 6 novembre 2014). Avec Giulia Salerno, Charlotte Gainsbourg, Gabriel Garko, Carolina Poccioni, Anna Lou Castoldi et Alice Pea.
L'affiche du film "L'incomprise" résume son sujet : Aria, une fillette à la silhouette d'enfant malingre non sexué, encore toute en bras et en jambes, et au séraphique visage de blonde aux immenses yeux bleus, a un coeur gros comme ça, un coeur plein d'amour mais aussi le coeur gros de ne pouvoir en obtenir en retour, et, pour tout bagage, un balluchon, certes griffé, et un chat noir.
Sa famille explose, une famille pas comme les autres, ce dont elle est consciente et fière, elle-même voulant déjà se démarquer des autres, avec des parents qui sont essentiellement des "artistes" narcissiques et égocentriques confortés dans leur comportement borderline par l'argent et la notoriété.
Une famille recomposée et décomposée par des géniteurs irresponsables et cyclothymiques qui alternent embrassades et coups pour leur enfant commun et dernière venue qui, tel l'oisillon dans son nid quémande sans cesse attention et amour alors que ses demi-soeurs ont déjà pris leurs marques.
La mère, pianiste renommée, junkie hystérique, nymphomane et caractérielle, n'aime que sa première fille qui sait négocier ses crises, et le père, physique de play boy un peu sur le retour, acteur célèbre et angoissé par sa carrière, superstitieux de manière pathologique, ne supporte que sa première fille, une adolescente bimbo ensuquée dans le rose girly et s'empiffrant de sucreries qui est la petite princesse de "son papa".
Et cependant, jamais elle ne cesse de les aimer. Son de reconnaissance et d'affection ne reçoit pas davantage satisfait dans la sphère enfantine, à l'école, où son look "branché' affiche sa différence et son statut d'"enfant de" et de bonne élève l'ostracisent auprès de ses camarades de classe aussi envieux que conformistes.
Alors elle navigue d'un appartement à l'autre, rarement la bienvenue, déjà livrée à elle-même, funambule sur le fil d'une quête désespérée.
Dans ce film autofictionnel, Asia Argento, elle aussi " fille de", du réalisateur Dario Argento et de l'actrice Daria Nicolodi, traite de manière sensible la thématique de l'enfance malheureuse à travers ses drames, du premier chagrin d'amour au sentiment d'abandon, et l'entrée brutale dans le monde adulte avec, son corollaire qu'est l'innocence perdue, déclinée dans le monde d'happy few de la bohème-chic des années 1980-1990.
A l'image des images du générique qui montrent un journal intime bardé de collages bariolés et de petits coeurs, le film de Asia Argento est un patchwork de scènes montées de manière kaléidoscopique sans hiérarchisation à l'instar de la perception juvénile qui réussit le bon dosage de l'émotion pour éviter le mélodrame pathétique et sait enchaîner les changements de registre pour passer, comme dans la vie, du rire aux larmes.
La distribution est judicieuse avec Charlotte Gainsbourg, également fille d'un couple "sulfureux" qui; avec ses cheveux noirs et ses yeux charbonneux, par une belle mise en abîme, ressemble à la mère de Asia Argento, et Gabriel Garko, ex-mannequin devenu un célèbre acteur transalpin qui s'autocaricature.
Et surtout, confondante de naturel et la tendresse à fleur de peau, la très jeune Giulia Salerno qui, avec sa fragile silhouette d'enfant malingre non sexué, encore toute en bras et en jambes, et son visage séraphique de blonde aux immenses yeux bleus, incarne parfaitement les affres de l'enfance. |