Spectacle conçu et mis en scène par Alice Laloy, avec Éric Deniaud, Stéphanie Farison et Justine Macadoux.
Avec "Sous ma peau/sfu.ma.to." qu'elle définit comme un "théâtre pictural avec flou artistique", Alice Laloy a conçu un spectacle singulier, atypique et passionnant, de surcroît une réussite absolue, à la croisée des genres et des arts.
Par hybridation de l'onirisme et du réalisme fantastique, il procède d'une combinatoire très pointue, d'une part, par le croisement des disciplines, le théâtre, de surcroît dans différents registres, du théâtre, nonobstant l'absence de partition narrative, du théâtre d'objets et du théâtre de marionnette, et les arts visuels pour inviter le spectateur à partager une expérience sensorielle en forme de divagation poétique.
Il ressortit à l'immersion dans l'invisible et à la traversée du miroir qui mène dans l'au-delà de la conscience pour aborder sur les rives d'une autre dimension, celles du rêve, de l'invisible, de l'inconscient et du sur-réel pour traiter, à partir d'une extrapolation et du décryptage de la technique picturale du sfumato, créant l'évanescence par la superposition de couches sensibles, de la révélation, de la métamorphose et du regard qui concourent à l'apparition de la face cachée des choses et du monde.
L'invitation au voyage est délivrée par un étonnant prologue délivrée par une voix féminine qui a un timbre voilé à la Macha Béranger et la scansion des officiants de la relaxation guidée ou l'hypnose qui suggère de lâcher-prise avec le réel et de se laisser porter par ce qui va advenir et qui commence par un extraordinaire ballet de cocottes-minute dont la vapeur sert de révélateur, à l'instar de le buée sur la vitre.
Tout ce qui suit, et qui ne saurait se relater dans le détail mais vécu par le spectateur, se déroule dans l'espace d'un musée imaginaire constituée de miroirs suspendus comme des tableaux dans un accrochage du 19ème siècle.
Les évocations s'enchaînent selon une possible logique du rêve dans une atmosphère d'irréalité floconneuse avec, entre autres, fumée et plumes, fantastique oie plumée qui tente de se remplumer et merveilleux oiseau constitué de quelques plumes collées sur deux baleines de parapluie, qui génèrent de merveilleuses images propices à l'évasion.
Le travail diligenté par Alice Laloy avec les talents de sa Compagnie S'appelle reviens, est éblouissant et magique d'autant qu'il est aisé de deviner sa complexité tant technique que réflexive sous son apparente simplicité dépourvue de machinerie effets spéciaux.
Au service du propos, tout est maîtrisé, cohérent et homogène : la scénographie inventive et créative élaborée par Jane Joyet, les lumières de Jean-Yves Courcoux et l'univers sonore et musical jamais invasif ni illustratif délivré en direct par le musicien et compositeur Eric Recordier discrètement installé côté cour
Sur scène, Éric Deniaud, Stéphanie Farison et Justine Macadoux réalisent de véritables prouesses pour créer l'illusion d'apesanteur et de fluidité tout en assurant une manipulation millimétrée.
Une pépite à découvrir absolument. |