Concerto Madrigalesco d'Ercole Bernabei
(EnPhases) mars 2023
Comme nous aurions aimé être une petite souris pour assister à la naissance de ce beau disque. Cavaler dans la nef, aller du narthex au chœur en passant par le transept dans l’église Notre-Dame de Trédrez-Locquémeau. Se cacher sous les bancs, se faufiler, observer Marco Horvat (théorbe, archiluth, lirone, guitare baroque), Ayumi Nakagawa (clavecin et orgue), Caroline Lieby (harpe), Eliaz Hercelin (basse de gambe), Anne-Sophie Eiselé (dessus et basse de viole, lirone), la soprano Myriam Arbouz, la mezzo-soprano Marine Fribourg, le haute-contre Andrea Gavagnin, le ténor et dessus et basse de viole Francisco Mañalich et la basse Jan Jeroen Bredewold.
Écouter l’ensemble Faenza chanter les pièces du Concerto Madrigalesco a tre voci diverse d’Ercole Bernabei. Être là, minuscule, presque invisible, peut-être chassée par Franck Jaffrès qui craindrait pour ses câbles, assister à la création, à l’élaboration de cette musique.
Originaire de Caprarola, Bernabei a été l’élève d’Orazio Benevoli, éminent compositeur de l'école romaine et d'Antonio Pastorelli. Il devient organiste puis maître de chapelle de l'église Saint-Louis-des-Français succédant à Luigi Rossi à la tribune de l'orgue, puis maître de chapelle de la basilique Saint-Jean-de-Latran poste occupé auparavant par Giuseppe Corsi. À la même époque, il est au service du prince Flavio Orsini, duc de Bracciano.
En juin 1672, grâce au soutien de la reine Christine de Suède, il est nommé directeur de la Cappella Giulia au Vatican. Il quitte ses fonctions assez rapidement puisque deux ans plus tard, il succède à Johann Kaspar Kerll en tant que maître de chapelle du prince Ferdinand-Marie de Bavière. Il y meurt en décembre 1687.
Digne élève de Benevoli, Bernabei se distingue par son aisance à manier le style polyphonique. Sa musique est dans la grande tradition de l'école romaine et évite les artifices trop exagérés. Il donne au chant une nouvelle force expressive, travaille particulièrement la prosodie. Une modernité, tout en s’appuyant sur une tradition (contrepoint simple, théorie des affects...) qui s’entend dans les pièces du Concerto Madrigalesco aussi bien dans la complexité de l’écriture en contrepoint que dans la beauté magnétique des mélodies.
Marco Horvat et l’ensemble Faenza, (superbe ensemble au demeurant) en font une interprétation ardente, virtuose. L’ensemble, habité musicalement, nous enveloppe de beauté avec sa richesse polyphonique, une mobilité des dynamiques, une finesse du phrasé, de l’articulation et de l’ornementation. Ils ont preuve d’une analyse presque scientifique, d’une recherche historique (le disque est enregistré dans le cadre du programme PerformArt porté par Anne-Madeleine Goulet du CNRS). Superbe.
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