Comédie dramatique de Harold Pinter, mise en scène de Claude bazin, avec Karine Adrover et Eric Franquelin.
Le théâtre de Harold Pinter, notamment celui de sa deuxième période, confine à l'épure et, de ce fait, ne relève ni des codes théâtraux ni de l'évidence.
Au Théâtre Essaion, après la diffusion d'une vidéo prégnante qu'il a réalisée sur un texte de Harold Pinter, "Le nouvel ordre mondial", interprétée par William Astren Julie Bereyre, Richard Perret et Elrik Thomas, qui, en quelques minutes, qui fait le tour de la casuistique de la pureté de l'acte de barbarie et est révulsante alors qu'elle ne montre rien, Claude Bazin met en scène avec intelligence et subtilité "Ashes to ashes".
Cette pièce courte plonge les protagonistes, comme le spectateur, dans une quatrième dimension étrange, fascinante et effrayante, nourrie des concrétudes contemporaines, un état de conscience du monde.
Des protagonistes dont on ne sait rien, au milieu d'une histoire sans trame narrative, fragment d'une histoire, instant d'une vie, sans début ni fin, et cependant construite comme une tragédie antique qui révèle son propos in limine quand la femme évoque l'éléphantiasis mental.
Un texte circulaire, plutôt en spirale, truffés de ruptures dans lequel le spectateur s’engouffre, se trouve ou se perd, qui nécessite une attention de chaque instant. Une femme raconte, un homme interroge. A moins que cela ne soit l'inverse. Comment une conversation banale, l'évocation d'une relation amoureuse aux connotations sadomasochiste induit des résonances avec les exactions commises dans le monde. Du pouvoir des mots aussi.
Et sur scène, deux comédiens talentueux et redoutables : Karine Adrover et Eric Fanquelin. |