Spectacle conçu et mis en scène par Charles Tordjman d’après des chroniques de Alexandre Vialatte, avec Christine Murillo, Julie Pilod et Dominique Pinon.
Charles Torjman a puisé dans le considérable thésaurus de chroniques écrites par le romancier et journaliste Alexandre Vialatte qui, pendant plus de vingt ans de 1952 à 1971, a aiguisé sa plume sur les petits travers quotidiens et les gros tracas métaphysiques de ses contemporains, pour composer un spectacle jubilatoire.
En effet, avec l'adaptation réussie de Jacques Nichet, "Résumons-nous, la semaine a été désastreuse" propose au spectateur de suivre sur les chemins de l'humour pince-sans-rire à l'absurde en passant par le loufoque, les élucubrations burlesques et les considérations cocasses, mais parfois pleines de bon sens voire de poésie surréaliste, des petites cellules grises de quidams coupeurs de cheveux en quatre et philosophes à la M. Jourdain devisant sur le monde vu par le petit bout de leur lorgnette.
Au rang des grandes préoccupations qui taraudent l'animal angoissé qu'est l'homme, la peste des écrevisses, le volume du cerveau, la longévité des Hollandais, la conquête de l'espace et les animaux astronautes, les pharmaciens fuyant l'orage, les vacances calamiteuses qui favorisent le bonheur de revenir au bureau, l'irréfutabilité de l'éléphant et l'orthographe du prénom Nathalie avec ou sans h.
Délice littéraire, pétillant, virtuose et savoureux l'écriture joyeuse de Alexandre Vialatte ne souffre, dans sa restitution orale, ni l'approximation ni le jeu d'acteur et, pour ce "théâtre-chronique" où "nous rirons de nous et du monde avec des pincettes" comme l'indique Charles Tordjman, ce dernier ne s'est pas trompé sur le choix des officiants hors pair.
S'adressant directement au public pris à témoin, ils sont parfaits dans la maîtrise de la diction, des inflexions et des ré-accentuations pour faire de ces "élucubrations" de véritables moments d'anthologie.
Le texte bien bouche, Julie Pilod, délicieuse et impeccablement sérieuse dans toutes ces saugrenues divagations, Dominique Pinon, mémorable en Tintin reporter factotum de l'auteur célébrant son Auvergne natale, et Christine Murillo, co-auteur avec ses compères Jean-Claude Leguay et Grégoire Oestermann d'un "Dictionnaire des tracas" porté également sur scène, qui ne pouvait qu'être interpellée par ces désopilantes chroniques, époustouflante vêtue en petit chaperon rouge contemporain, sont parfaits.
Et ils prennent un plaisir évident à l'exercice. Ce qui concourt à faire de ce spectacle un beau moment partagé. |