Finaliste du Booker Prize 2020, l’ouvrage d’Avni Doshi devrait rencontrer un très beau succès chez nous car il s’avère être un superbe premier roman. C’est un ouvrage troublant et émouvant que nous propose l’auteur américaine autour de la maladie d’Alzheimer.

A la cinquantaine, la mère d’Antara déclenche les premiers symptômes de cette terrible maladie. Tout le monde attend très vite que sa fille unique prenne soin d’elle pour combattre cette maladie. Mais la jeune fille renâcle. Car plus le passé déserte l’esprit de sa mère, plus le sien est envahi. Ma ne l’a ni élevée, ni aimée, ni respectée. Quand elle avait quatre ans, Ma s’est entichée d’un gourou, a fait fuir son père, l’a entraînée dans la secte d’Osho puis abandonnée aux tortures d’un pensionnat catholique.

Avec les souvenirs cruels, la colère longtemps refoulée déferle jusqu’à lui faire rêver d’euthanasie. A l’heure où elle s’apprête à devenir mère à son tour, elle en vient à redouter le mimétisme. Ses dessins bizarres, obsessionnels, et ses installations auraient pu lui apporter la paix, si seulement Ma ne s’était pas employée à saboter sa vocation d’artiste.

Je ne me souviens pas avoir lu un ouvrage qui traitait de cette terrible maladie qu’est la maladie d’Alzheimer. Des ouvrages sur les relations compliquées entre une mère et sa fille est par contre beaucoup plus courant. Ici, la combinaison des deux avec une mère qui perd ses souvenirs quand ceux de sa fille se ravivent fonctionne parfaitement.

L’auteure parvient à disséquer les sentiments et les ressentiments d’un amour mère-fille impossible tout en traitant de la société indienne (au cœur du sujet), patriarcale et fataliste, un miroir impitoyable. A cela s’ajoute le fait qu’Antara est une artiste, ce qui permet à l’auteur de subtilement de nous dévoiler son point de vue de son côté femme et fille mais aussi de son côté artiste. Cela nous donne une profondeur de sentiment et d’analyse plus important.

C’est une lecture intense que nous propose cet ouvrage, dense aussi puisqu’il traite de nombreux sujets comme les sectes, la société indienne, l’enfance aussi et surtout la mémoire, au cœur de l’ouvrage. Il nous rappelle que les relations entre parents et enfants ne sont pas toujours faciles, qui sont parfois fragiles mais toujours présents. Les souvenirs peuvent disparaître, être source de mal-être, remonter à la surface mais les liens du sang sont éternels.

Voilà donc là est un bien beau premier roman qui traite de sujets difficiles avec élégance mais aussi parfois avec beaucoup d’humour. On s’attache facilement au personnage d’Antara qui tente de combattre la toxicité de sa relation avec sa mère. Encore une belle découverte faite grâce aux éditions Globe qui savent toujours dénicher de beaux livres.