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puce Cycle 30 ans de Rivages/Noir - Un flic sur le toit
Cinémathèque française  (Paris)  Du 7 septembre au 9 octore 2016

Quel est le point commun entre le western de Delmer Daves "3h10 pour Yuma", le paranoïaque "Trois jours du condor" de Sidney Pollack, l’hommage de Quentin Tarantino à la blaxploitation, "Jackie Brown", ou les classiques du film noir réalisés par Jacques Tourneur ?

Tous sont adaptés de roman édités par Rivages/noir. La collection fondée par François Guérif fête cette année ces trente ans, et le moins qu’on puisse dire, c’est que la Cinémathèque nous fait, à nous aussi, un beau cadeau à cette occasion.

Bien sûr, il y a toujours les incontournables, ces films magnifiques qu’il faut voir sur grand écran. On ne dira jamais assez de bien de "Out of the past" de Jacques Tourneur : érotisme, tristesse et fatalité se mêlent dans l’un des plus beaux films noirs jamais réalisé. Bob Mitchum, qui promène son malheur, voit, impuissant, sa vie se dérober à lui.

Et après ce film-là, allez donc voir "Nightfall", très belle adaptation de Goodis, film moins connu mais tout aussi intéressant. A titre personnel, on a aussi une préférence pour le "Mystic River" de Clint Eastwood. Du très bon polar de Dennis Lehane, il fait un film bouleversant sur la paternité et l’enfance, son thème fétiche ; la violence subie par es enfants hante ce film, qui également habité par un amour extraordinaire.

On remarquera que des auteurs sont particulièrement mis à l’honneur. Dennis Lehane, avec "Mystic River", mais aussi "Gone baby gone" (Ben Affleck) et "Shutter Island" (Martin Scorsese) se voit adapter de trois manières très différentes. Et puis il y a aussi le maître incontesté du roman noir, James Ellroy, qui était l’invité d’honneur de cette rétrospective : "L.A. Confidential" (Curtis Hanson), et le moins illustre "Cop" (James B. Harris) qu’on serait curieux de voir.

Pour ceux qui l’avaient raté en 2010, "Winter’s bone" de Debra Granik est une plongée dans une Amérique profonde et plutôt dégénérée. Dans ce conte de fée hivernal, une jeune fille, jouée alors par une quasi inconnue appelée Jennifer Lawrence, doit s’occuper de ses frères et sœurs. Elle part à la recherche du corps de son père qui devrait leur permettre de toucher de l’argent. Le film atteint son point culminant lors d’une promenade en barque qui n’a rien d’une partie de plaisir.

On le voit, la majorité de la sélection est américaine. Mais n’oublions pas "Gumshoe", du britannique Stephen Frears, curieuse enquête qui oscille entre film noir et parodie où Albert Finney traine son imperméable dans la ville ; si l’on a du temps, on aura peut-être envie de suivre la trilogie "Red Riding". Cette adaptation est certes bien moins puissante que les romans de David Peace. Mais la transposition à l’écran de cette enquête qui dure une décennie et nous fait plonger dans une Angleterre poisseuse et sale ne manque pas de noirceur.

Ajoutez à cela deux films italiens ("Il passato è una terra straniera" de Daniele Vicari, "La mort remonte à hier soir" de Duccio Tessari), un film suédois ("Un flic sur le toit" de Bo Widerberg), un français ("Toutes peines confondues" de Michel Deville) et vous obtiendrez un très bon cru automnal. Et sans doute l’envie de beaucoup lire à l’heure où la pluie se mettra à tomber.

Un flic sur le toit
Réalisé par Bo Widerberg.Suède. Policier. 1h50. (Sortie en 2009). Avec Carl-Gustav Lindstedt, Sven Wollter, Thomas Hellberg, Håkan Serner, Ingvar Hirdwall et Bellan Roos

Le cinéma suédois est parfois réduit, à tort, à un seul cinéaste : Ingmar Begman. Monument écrasant, l’auteur de "Cris et chuchotements" reste la grande référence cinématographique de son pays. Heureusement, depuis quelques années, on se souvient de Bo Widerberg, cinéaste extrêmement intéressant, porteur d’un vent de renouveau.

Son cinéma, engagé et audacieux, prouve avec de récentes éditions DVD qu’il n’a rien perdu de sa fraicheur et de sa force revendicatrice. Liberté sexuelle "(Le Péché suédois"), amours interdites dans la Suède du 19ème siècle ("Elvira Madigan"), film social sur la répression d’une grève d’ouvriers en 1931 ("Andalen 31")…

Bo Widerberg, en noir et blanc ou en couleurs, dans des films historiques ou contemporains, dresse à chaque fois le portrait d’une société corsetée, restrictive qui lutte, par la réprobation muette ou par les armes, afin que jamais la liberté ne triomphe.

On en retrouve quelque chose dans cette adaptation du classique suédois écrit par de Maj Sjöwall et Per Wahlöö. Dans une Suède particulièrement morne, des policiers sont brutalement assassinés. Vengeance personnelle ? Acte d’un maniaque qui rejette tous les symboles de l’autorité ?

Bien vite, on découvre que les victimes n’étaient pas si innocentes que cela ; flics sadiques, corrompus, coupables de brutalités policières et de négligence, elles apparaissent peu à peu comme des bourreaux. La deuxième séquence du film s’achève sur un véritable bain de sang dans un hôpital.

Et pourtant, l’enquête qui constitue la majeure partie du film se déroule lentement, presque paisiblement. Quatre policiers aux méthodes assez différentes, cherchent la clé de l’énigme sans jamais céder à la panique ou aux pressions.

Tous évoluent dans un monde terne : la photographie du film est dans les tons jaunes, verts et bleus pâles, ce qui nimbe le film d’une atmosphère de tristesse. Ce monde est déjà vieilli. Vieilli, comme ces policiers fatigués toujours au bord de l’assoupissement. Durant le temps que dure l’enquête, l’un d’entre eux, terriblement en manque de sommeil, s’endort sporadiquement à tout moment. Cette répétition comique concourt également au côté naturaliste d’"Un flic sur le toit".

Les policiers ne sont, en effet, ni des superhéros ni des surhommes. Widerberg les filme brièvement dans leur quotidien, avec leurs femmes et leurs enfants. Une grande partie du film est à l’image de ce policier qui construit, durant son temps libre, une maquette de bateau. On a plaisir à se retrouver dans un univers "à l’ancienne", où enquêter signifie se munir d’un carnet et donner des coups de téléphones à des témoins.

La scène de crime est passée à la poudre à empreinte, mais on en suit aussi le nettoyage à grandes eaux. Le travail est long, précis, minutieux, extrêmement concret. La même précision réapparaît à la fin du film, beaucoup plus rapide. L’un des policiers vient en aide à un collègue, blessé par le fameux "flic sur le toit"» qu’annonce le titre. Dans un silence que ne rompent que les cliquetis d’une ceinture, on suit les efforts de cet homme pour rapatrier un corps lourd et blessé. Arrêter une hémorragie, sécuriser la descente d’un corps…

On ne peut s’empêcher d’évoquer Jean-Pierre Melville devant cette efficacité sèche de la mise en scène. Ici, point de fioritures, d’effets de mise en scène destinés à faire monter de manière artificielle le suspense. L’intervention des forces armées qui brisent, mais presque avec délicatesse, les vitres de l’immeuble où s’est réfugié le tueur, n’est pas sans évoquer le récent Nocturama, de Bonello, par sa redoutable et douce efficacité.

Par ailleurs, Widerberg prouve qu’il sait également mener avec beaucoup d’efficacité des scènes d’action. A la fin du film, tout s’accélère sans pour autant que le côté très quotidien du film ne soit entièrement effacé : témoin cette vieille dame qui insiste pour donner des petits gâteaux au policier en faction chez elle durant la fusillade. Le geste du tireur, isolé sur son toit, est une explosion de violence qui fait voler en éclat la loi du silence et le pouvoir étatique. Il vient couronner la révolte qu’on sentait déjà poindre dans les cellules du commissariat.

Provocation malicieuse de Widerberg : le préfet chargé de contrer les agissements du tireur se trouve peu à peu dépourvu, et remplacé par un policier insolent qui n’hésite pas à le traiter de dictateur. Assisté d’un citoyen, c’est lui qui met en place les moyens pour appréhender le tueur. Est-ce là dire que l’autorité est incapable de réprimer les monstres auxquels elle a elle-même donné le jour ?

Face à tous ces personnages, la foule, risquant sa vie, avide de sensations fortes, et les media, déjà, à l’affût de la violence. Dans cette Suède des années 1970, les meurtres ne semblent être que l’aboutissement d’une société où chacun se repaît de la violence souterraine.

 

Anne Sivan         
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