Réalisé par Show-Chun Lee. France. Drame. 1h15 (Sortie le 30 décembre 2015). Avec Anthony Pho, Martial Wang, Carole Lo, Alice Yin, Olivier Chen et Jacques Boudet.
Evidemment, il ne faudra surtout pas comparer "Shanghai Belleville" de Show-Chun Lee et "Au-delà des montagnes" de Jia Zhang-Ke.
Le premier film de la réalisatrice franco-chinoise n'a pas les ambitions universelles du chef d'oeuvre du réalisateur chinois. Ici, elle veut avant tout montrer dans sa diversité, son bouillonnement, sa rage d'exister, ce qu'est la communauté chinoise de France, celle dont les activités licites ou non se passent entre le bas et le haut Belleville.
L'originalité de "Shanghai Belleville" est d'avoir choisi comme héros principaux des "Chinois" singuliers, comme ce jeune garçon appelé "le Croate" parce que dans leur "exode" vers l'Occident, ses parents ont du s'arrêter en Croatie et qu'avant de rejoindre la France, il a grandi là-bas et que le voilà maintenant dans les rues de Belleville sans papiers et sans beaucoup de notions de la langue chinoise.
Il y a aussi "Mr Wang", véritablement tombé sur le sol bellevillois alors qu'il recherche sa femme sans doute victime d'un réseau de prostitution. Car Show-Chun Lee s'est également intéressé à ses femmes qu'on trouve en nombre sur les boulevards autour de Belleville.
Avec Anna, interprétée finement par Carole Lo, elle a construit un beau personnage de femme battante qui compte s'émanciper "grâce" à la prostitution, et qui n'en est pas moins solidaire avec les plus malheureux qu'elle.
On pourra trouver une petite parenté de "Shanghai Belleville" de Show-Chun Lee avec "Neige", le film de Juliet Berto. Dans les deux films, Paris se réduit aux limites d'un quartier, et les personnages s'y croisent ou s'y heurtent, à la fois libres et prisonniers, maîtres de leurs destins et proies de hasards prédéterminés.
Tour d'horizon quasi exhaustif des Chinois de Belleville, bien documenté sociologiquement, "Shanghai Belleville" ne récite cependant pas une leçon de sociologie appliquée.
On suivra le film sans déplaisir et l'on découvrira, rien qu'en lisant les prénoms des protagonistes, que la légende d'une communauté fermée qui n'a pas l'intention de se mêler aux autres, Français ou immigrés, a bien du plomb dans l'aile.
"Shanghai Belleville" de Show-Chun Lee surmonte ses maladresses formelles et dresse de beaux portraits dans un film humaniste dont l'intérêt ne faiblit jamais. |