Comédie de Molière, miese en scène de mise en scène Galin Stoev, avec Claude Mathieu, Michel Favory, Cécile Brune, Michel Vuillermoz, Elsa Lepoivre, Serge Bagdassarian, Nâzim Boudjenah, Didier Sandre, Anna Cervinka, Christophe Montenez, Claire Boust, Ewen Crovella, Thomas Guené et Valentin Rolland.
"Tartuffe" à la Comédie-Française…ou Wagner à Bayreuth. Ou comment transformer une évidence en surprise. "Quoi de neuf ? Molière !".
Orgon et sa vieille mère sont coiffés d’un "gourou" vieille-sauce, Tartuffe, spiritualiste plus que religieux, qui règne sur la maison d’un autre, en poissonnant dans son âme.
La jeune fille de la maison est elle-même promise au cuistre-prêcheur, tandis qu’un beau-frère honnête et une femme aimante, flanqués d’une domestique espiègle, Dorine, ne réussissent, en rien à déciller les yeux de l’aveugle. Un subterfuge de comédie réussira enfin à"déculotter" (dixit Rimbaud) l’infâme.
Pour mettre en scène cette pièce-culte, qui couta si cher à Molière, sa Maison a fait appel à un metteur en scène bulgare, Galin Stoev qui vit "entre France, Belgique et Bulgarie". Le résultat est probant et la pièce, confirmée universelle.
Michel Vuillermoz réussit là une nouvelle démonstration de son grand talent, inquiétant, mouvant, habile, terrible de noirceur et d’appétit. Elsa Lepoivre, superbe comédienne, campe une Elvire aimante et forte, beau personnage de femme qui sert d’appât à la recherche de la vérité.
Serge Bagdassarian est l’honnête homme, sphérique et argumentant, tandis que Nazim Boudjenah est un Valère pré-romantique, enfant gâté au bord des larmes. Cécile Brune incarne une Dorine avec toute la rouerie et l’esprit nécessaires.
Mais c’est Orgon qui devient, ici, le personnage principal. Victime consentante, tigre de lui-même, il se donne à l’Imposteur, comblant un grand manque d’amour. C’est l’immense Didier Sandre qui fait basculer la pièce de ce côté-là, lui donnant un éclairage étonnant et angoissant. Et contemporain.
La modernité a toujours soif de reconnaissance. Quelques bizarreries de scénographie - masques de "géants", beuveries, faces de Carême - n’ôte rien à la grandeur de cette pièce et à la violence du jeu. C’est un Molière "à l’estomac". |