Comédie dramatique de Dominique Warluzel, mise en scène de Delphine de Malherbe, avec Pierre Santini, Jean-Pierre Kalfon et Bertrand Nadler (en alternance Franck Borde).
Même naissance, même éducation, et cependant, depuis l'enfance, tout a toujours opposé les deux frères aux tempéraments différents de "Fratricide".
L'aîné est conformiste, le cadet est rebelle. Le premier, qui a l'intelligence des situations, peut se vanter d'une belle situation et d'une brillante carrière d'avocat.
Le second, compulsif qui ne connaît que l'affrontement, a suivi les chemins de traverse et sort de prison. Leur point commun : être fils d'un père qui n'a su ni les aimer ni se faire aimer.
Après plusieurs décennies d'ignorance respective, ils se retrouvent dans un office notarial à l'occasion du décès du père. Celui-ci, sans doute à l'origine de leur antagonisme et de leur ressentiment réciproque, initie post-mortem un dernier duel fratricide en laissant au notaire le soin de répartir son héritage substantiel selon le degré d'attachement filial de chacun.
Entre deux interventions du clerc de notaire, le lavage de linge sale en famille bat son plein. Sont ouvertes les vannes qui ont tenu scellé les rancunes et des rivalités fraternelles sans résilience et exacerbées par le partage des petites cuillères, en l'occurrence en or massif.
De ces thématiques classiques, celles des frères ennemis et des batailles successorales, et sous la forme non moins classique du huis-clos, Dominique Warluzel concocte une partition percutante, sans gras, toute en muscles. Irrigués d'ironie, de cynisme et d'humour désenchanté, les dialogues sont empreints du réalisme du langage parlé et ne versent pas dans la théâtralisation.
Selon un expression triviale ils "sentent le vécu" ou du moins l'entendu. Car Dominique Warluzel n'est pas un homme de théâtre mais un avocat réputé, profession qui permet de prendre la mesure de la nature humaine plus sûrement que celle du dramaturge en chambre. De plus, homme de la parole aguerri aux joutes verbales, il manie une plume aiguisée pour brosser des assauts qui tiennent à la fois du réquisitoire et du plaidoyer.
La mise en scène de Delphine de Malherbe a la sobriété qui sied à ce genre d'exercice d'autant que la distribution est solide et qu'elle dirige, outre Bernard Nadler dans le rôle du clerc, deux comédiens qui ne sont pas des débutants.
Comédiens et acteurs de cinéma et de télévision de la même génération, Pierre Santini et Jean-Pierre Kalfon ont le métier nécessaire pour nourrir des personnages qui ne sont pas que de papier ue l'auteur soumet à quelques incidents de parcours qui révèlent leurs failles.
Pierre Santini campe avec assurance le notable monolithique sûr de lui, rompu à toutes les manoeuvres et rodé aux coups bas. Spécialiste du rôle de "bad boy", Jean-Pierre Kalfon se trouve en terrain connu et compose de manière pointilliste ce frère qui ne connait que l'attaque frontale qui le blesse davantage qu'il n'ébranle l'adversaire.
Excellent, le duo fonctionne en symbiose dans ce duel qui repose sur les affects enfouis et commence par des échanges de balles à fragmentation. Et rien dans son jeu ne laisse présager de l'inattendu dénouement. |