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puce Philippe Torreton & Edward Perraud
La Cigale  (Paris)  lundi 15 février 2016

Ils sont venus, ils sont tous là, dès qu’ils ont entendu ce cri : "il va revivre, Leprest !" Dans une Cigale pleine à craquer, Torreton a bouclé en beauté sa série de spectacles consacrés à l’œuvre du chanteur-auteur rouennais. La tournée reprendra en 2017. En attendant, on peut patienter et se faire une idée assez juste du spectacle avec le CD sorti chez Tacet (et déjà chroniqué ici).

Sur scène, c’est à la fois presque la même chose… et subtilement différent. D’abord, l’aspect visuel : Torreton jouait, ce lundi-là, entre deux représentations de son Cyrano psychiatrique, au Théâtre de la Porte-Saint-Martin. Il en avait le crâne rasé, la moustache, les muscles… et peut-être encore aussi un peu l’énergie, voire la violence, qui sait ? Il a souvent donné l’impression de boxer avec ou contre les mots : le public prend visiblement plaisir à les recevoir en pleine poire, tandis que les moulinets du percussionniste sur l’un ou l’autre fût changent un direct de toms en uppercut de caisse claire, un crochet de grosse caisse en caresse de cymbale, etc.

Torreton ne possède pas une voix de conteur dotée d’infinies nuances : a priori, il reste assez monocorde, mais compense cette relative limite (en musique, on dirait qu’il a une amplitude vocale restreinte, pas énormément d’octaves à son registre) par une intensité à couper le souffle. C’est particulièrement bluffant sur les titres rapides, comme "Le Sac à main de la putain", "Ton cul est rond" ou "Rimbaud", pétaradants comme jamais. L’extrême lenteur lui va aussi : "Y’a rien qui se passe", étirée ici à plus de sept minutes, est dite avec un supplément de gravité poisseuse, désabusée, qui achève de plomber intelligemment l’ambiance au pauvre narrateur ; "Edith", déshabillée de la musique extrêmement douce que lui avait composée Romain Didier et poussée dans une noirceur solennelle (morbide mais non dénuée de tendresse, toutefois), colle avec le texte où il est question de visiter un cimetière. On a beau savoir de qui parle la chanson... l’étirement en longueur redonne à sa chute la belle gravité émue qu’elle méritait.

Entre ces deux extrêmes, les rares bémols éprouvés à l’écoute du disque sont rectifiés en version scénique : "Il pleut sur la mer", qui nous avait paru trop statique et inutilement assombri, change du tout au tout quand Torreton prend, pour le dire, un air si désabusé qu’il en devient presque drôle ! C’est un effet de manche imprévu, nuance nouvelle (donc bienvenue) à ce texte que l’on croyait connaître par cœur. Autres déceptions du disque rattrapées sur scène : les coquilles au "Temps de finir la bouteille" et à "Chanson noire" ont été corrigées – cette dernière, dite au rappel sans micro devant la standing ovation méritée, prend une dimension inédite : oasis de simplicité après tant de textes riches. C’est ainsi qu’il fallait la réciter : pas de façon ampoulée (cf. le disque), mais comme un post-scriptum rêveur et léger, après 1h30 d’une belle densité.

Quelques nuances se sont glissées ici et là entre album et spectacle : l’ordre des morceaux, très légèrement modifié ("Ton cul est rond" ne succède plus au "Sac à main", mais à "Martainville", par exemple), aboutit à un set plus rythmé, évitant un trop long tunnel de titres lents. Deux nouveaux textes se sont joints à la fête : "Nu", tout d’abord, classique parmi les classiques (dont un vers donne d’ailleurs son titre au récent album de JeHaN / Suarez déjà chroniqué, Pacifiste Inconnu – ils seront au Studio de l’Ermitage le 2 mars). A dire vrai, ce n’est pas notre Leprest favori : si on voulait être méchant, on dirait que cette suite de rimes en "nu" – "biscornu", "devenu", "inconnu" – sonne parfois un peu… convenue. Surtout, c’est un léger contresens dans un spectacle intégralement consacré à la plume de l’auteur, puisqu’il s’agit du seul texte ici à être… une coécriture (avec Sylvain Lebel, en l’occurrence). Torreton en livre une belle version. Mais on se dit qu’à tout prendre, il aurait pu choisir quelque chose d’un peu plus pertinent.

Le meilleur pour la fin : "Bilou", qui ne figurait pas sur le CD, en rappel. Edward Perraud lâche ses percus et se lance dans une partie de guitare légèrement bruitiste au premier abord, gentiment dissonante, aussi chancelante que le personnage. Torreton dit avec émotion ce texte sur la dépression (et l’espoir de rémission), quand le miracle advient : la guitare, raclée et torturée dans tous les sens, se met à gratter des accords qui commencent à ressembler, de loin… à ceux de la mélodie originelle. Et plus Torreton avance, plus la guitare, d’abord incohérente, semble recoller les morceaux d’une mémoire éparse, jusqu’à retrouver in fine la suite d’accords de cette chanson intemporelle (dont la musique était signée Etienne Goupil). C’est la conclusion logique – belle, et rudement intelligente – à ce spectacle audacieux mais respectueux : qu’après avoir déconstruit les partitions délicates, livré les mots en pâture aux percus et autres bruitages, la mélodie retrouve finalement ses droits, et que le slam (ou poésie scandée, appelons ça comme on veut) redevienne, l’espace d’un court instant (et pour boucler la boucle)… de la chanson !

 

A lire aussi sur Froggy's Delight :

La chronique de l'album MEC ! de Philippe Torreton & Edward Perraud

En savoir plus :
Le site officiel d'Edward Perraud
Le site officiel de Karavane Productions
Le Soundcloud de Tacet


Nicolas Brulebois         
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# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine

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Du côté de la musique :

"Génération (tome 1)" de Ambre
"Out" de Fishtalk
"Take a look at the sea" de Fontanarosa
"Venus rising" de Trio SR9 & Kyrie Kristmanson
"Perpétuel" de Vesperine
"Liminal status" de Watertank
"The great calm" de Whispering Sons
"Keep it simple" de Yann Jankielewicz , Josh Dion & Jason Lindner
Quelques nouveautés en clips avec Isolation, Resto Basket, Greyborn, Bad Juice, Last Temptation, One Rusty Band, We Hate You Please Die
nouvel épisode du Morceau Caché, consacré à Portishead
et toujours :
"Kit de survie en milieu hostile" de Betrand Betsch

"Let the monster fall" de Thomas de Pourquery
"Etat sauvage" de Chaton Laveur
"Embers of protest" de Burning Heads
"Sin miedo" de Chu Chi Cha
"Louis Beydts : Mélodies & songs" de Cyrille Dubois & Tristan Raës
"Arnold Schönberg : Pierrot lunaire" de Jessica Martin Maresco, Ensemble Op.Cit & Guillaume Bourgogne
"C'est pas Blanche-neige ni Cendrillon" de Madame Robert
"Brothers and sisters" de Michelle David & True Tones
"Prokofiev" de Nikita Mndoyants
"Alas" de Patrick Langot, Alexis Cardenas, Orchestre de Lutetia & Alejandro Sandler
"Symptom of decline" de The Black Enderkid
"Tigers blood" de Waxahatchee
"Not good enough" de Wizard

Au théâtre :

les nouveautés :

"37 heures" au Théâtre la Flèche
"Fantasmes" au Théâtre La Croisée des Chemins
"Sonate d'automne" au Théâtre Studio Hébertot
"Frida" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses

"Preuve d'amour" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Après les ruines" au théâtre La Comète de Chalons En Champagne
"Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Royan, la professeure de français" au Théâtre de Paris
Notes de départs" au Théâtre Poche Montparnasse
"Les chatouilles" au Théâtre de l'Atelier
"Tant que nos coeurs flamboient" au Théâtre Essaïon
et toujours :
"Come Bach" au Théâtre Le Lucernaire
"Enfance" au Théâtre Poche Montparnasse
"Lîle des esclaves" au Théâtre Le Lucernaire
"La forme des choses" au Théâtre La Flèche
"Partie" au Théâtre Silvia Monfort
"Punk.e.s" Au Théâtre La Scala
"Hedwig and the angry inch" au théâtre La Scala
"Je voudrais pas crever avant d'avoir connu" au Théâtre Essaïon
"Les crabes" au Théâtre La Scala
"Gosse de riche" au Théâtre Athénée Louis Jouvet
"L'abolition des privilèges" au Théâtre 13
"Lisbeth's" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses
des reprises :
"Macbeth" au Théâtre Essaion
"Le chef d'oeuvre inconnu" au Théâtre Essaion
"Darius" au Théâtre Le Lucernaire
"Rimbaud cavalcades" au Théâtre Essaion
"La peur" au Théâtre La Scala

Une exposition à la Halle Saint Pierre : "L'esprit Singulier"

Du cinéma avec :

"Le déserteur" de Dani Rosenberg
"Marilu" de Sandrine Dumas
"Que notre joie demeure" de Cheyenne-Marie Carron
zt toujours :
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"L'île" de Damien Manivel
"Le naméssime" de Xavier Bélony Mussel
"Yurt" de Nehir Tuna
"Le squelette de Madame Morales" de Rogelio A. Gonzalez

Lecture avec :

"Hervé le Corre, mélancolie révolutionnaire" de Yvan Robin
"Dans le battant des lames"' de Vincent Constantin
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"Prendre son souffle" de Geneviève Jannelle
et toujours :
"L'origine des larmes" de Jean-Paul Dubois
"Mort d'un libraire" de Alice Slater
"Mykonos" de Olga Duhamel-Noyer
"Des gens drôles" de Lucile Commeaux, Adrien Dénouette, Quentin Mével, Guillaume Orignac & Théo Ribeton
"L'empire britanique en guerre" de Benoît Rondeau
"La république des imposteurs" de Eric Branca
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