Pierre Bonte est de ces piliers qu’on a envie d’appeler Monsieur Pierre, autant parce qu’il est un ponte en son domaine que parce qu’il évoque une France rurale où les connaissances se nomment avec un déterminant, un surnom, un diminutif ou un titre.
Auteur d’une dizaine de livres, il a débuté sa carrière en créant une émission radiophonique : Bonjour Monsieur le Maire, dans laquelle il présente des communes de France. A l’instar de nos ancêtres qui sont tombés dedans quand ils étaient petits, Pierre Bonte est tombé en amour de cette Gaule qu’il sillonne. A sa carrière s’ajoute aujourd’hui Mes Petites France "Nous sommes tous des provinciaux".
15 chapitres pour 15 classifications régionales, où les préjugés prétextes à des racismes de toute sorte se côtoient entre bonnes adresses et anecdotes d’anciens. L’anti-jeune n’est pas loin, mais Monsieur Pierre a la décence de ne jamais basculer dans le jugement, et retrouve ses premiers amours en décrivant ce qu’il a vu dans ses régions.
Honnêtement, je ne suis pas particulièrement attachée aux préjugés régionaux, mais j’aime entretenir l’idée que j’aurai le dernier mot puisque je suis auvergnate. Je vous entends ricaner sur ma soi-disant pingrerie, mais saviez-vous que mes comparses sont les plus écolos de France ? Nous n’aimons pas le gaspillage, voilà tout.
Les Tourangeaux se la pètent parce qu’ils ont longtemps été les cuistots des perruques poudrées, les Bretons et les Auvergnats se ressemblent (je ne sais pas si c’est un compliment), les Nordistes sont des fêtards, les Gascons éructent le verbe à pleine voix, les Savoyards sont discrets… Mais alors, comment définir un enfant issu d’un papa Breton, d’une maman berrichonne, habitant en Provence ?
Pas besoin d’avancer en lecture pour comprendre que Monsieur Pierre ne cherche qu’à perpétuer d’anciennes traditions, face à l’écrasant socialisme qui abolit les frontières pour regrouper, assembler, diluer ces caractères…
Mais ne vous inquiétez pas, bande de gaulois tapageurs ! Nous n’avons pas changé. La preuve ? Tant que vous continuerez à défendre votre sauciflard, à hurler dans les stades, à vous empiffrer de tartiflette, la France restera la Gaule, ce pays jonché de tribus disparates adorant guerroyer dans la boue avant de se retrouver autour d’un banquet fleuri. Maudits français diraient nos voisins, mais nous leur rendons bien. Nous savons être local quand nous défendons nos spécialités et national quand nous supportons nos équipes face aux extra-France.
Et ce n’est pas tout, le roman quasi documentaire regorge de petites adresses où il fait bon s’enfiler deux-trois trucs derrière la cravate. Quelques personnages locaux sont décrits, mais il en manque tellement que Monsieur Pierre peut écrire trois autres romans pour les personnages qui viennent de province.
Ce roman est un étonnant voyage dans le passé, les racines et les traditions. Un peu comme écouter pépé raconter dix fois la même histoire, éclater de rire au même moment, parce qu’il raconte bien les histoires, mais aussi parce que ce petit jus de l’été dernier (c’est pas fort ! Reprends-en !) fait son effet… et pas question de décoller avant d’avoir fini ton fromage ! |