La jaquette de Moi, Abraham d’Eric Nataf promet l’ultime révélation "Comment j’ai découvert Dieu", justement, moi aussi j’aimerai bien savoir, j’ai deux-trois trucs à lui demander. L’auteur se met dans la peau du célébrissime Abraham pour nous expliciter son long cheminement jusqu’à Dieu, et plus précisément, jusqu’au Dieu Unique, toutes religions confondues.
Mais au fait, c’est qui ce Abraham ? Tout le monde a entendu son nom au moins une fois dans sa vie, mais est-ce que tout le monde peut le situer ? Rattrapage : Adam et Eve (les amoureux originels) dix générations plus tard : Noé (le type qui a mis des couples d’animaux dans un gros bateau pendant une giga inondation), dix générations plus tard : Abraham (celui du bouquin), dix générations plus tard : Moïse (le frère adoptif du prince d’Egypte). Et oui, tous de la même famille, généalogie détaillée à l’appui en fin d’ouvrage.
Abraham nous raconte son long cheminement personnel, de la remise en question du panthéon local avec ses multitudes de statuettes à vénérer (le dieu du foyer, le dieu de l’amour, le dieu de la cuisine, le dieu de la chasse, le dieu des pantoufles, le dieu des enfants, le dieu des bébés, le dieu des symboles…), jusqu’à la révélation d’Une puissance plus abstraite sans forme ni limite. Le récit vient du fond des âges, chaque évènement est décrit avec beaucoup de recul, et mis en relation avec ses résonances dans le passé, et les conséquences que chaque décision prise a dans le futur.
C’est la voix d’un vieillard, dans tout ce qu’il peut avoir de séculaire, doté d’une ouverture d’esprit incroyable. Ce n’est pas pour rien qu’il est aujourd’hui considéré comme le "Père des croyants". Ses paroles trouvent un écho dans chaque croyance monothéiste, dans ce qu’elles ont de plus originel, sans dérive sectaire ni extrémisme, dans toute la ferveur et l’irrationalité que la foi comporte.
Ni un journal intime, ni un exposé rébarbatif sur la naissance des religions monothéistes, ni un essai indigeste d’exégète averti, l’auteur propose une analyse du besoin de croire en une puissance supérieure faite d’amour, de bonté, de paix et de miséricorde, pour se soustraire à la crainte inspirée par les idoles friandes de pouvoir, de sacrifices et d’offrandes en tout genre. Un genre de gentil-Dieu pour faire une tête au carré aux impôts levés par un michton qui se prend pour le grand manitou.
Cette analyse est sans prétention, sans intention de convertir, sans critique, de la part d’un auteur qui sait trouver les mots justes pour partager, pour expliquer, pour retourner à l’origine des choses, pour les comprendre.
Au sein de la fascinante Mésopotamie berceau des civilisations, Eric Nataf nous offre un délectable moment de sagesse ancestrale, comme un "Croire pour les Nuls" à consommer sans modération. Peut-être pour toucher du doigt la sagesse, dans un monde qui n’est que ce que l’Homme en a fait, finalement. |