Je n’ai jamais été un grand admirateur d’Aurélie Fillippetti en tant que femme politique. Elle fait partie pour moi de ces ministres qui auront traversé la Cinquième République sans vraiment laisser de traces de leurs passages. Pour ce qui est de l’auteur, je dois bien avouer que mon avis est beaucoup plus nuancé puisque je n’ai encore jamais lu le moindre ouvrage de cette femme. Pour autant, elle n’en a pas sorti non plus des quantités mais son passé d’enseignante et ses qualités d’expression en font une romancière à part entière. Me voilà donc avec ce qui fut annoncé comme le grand roman politique de la rentrée littéraire, Les Idéaux, publié chez Fayard.
Avec Les Idéaux, Aurélie Filippetti nous raconte l’histoire d’une femme et d’un homme à travers une histoire d’amour et d’engagement. Tout les oppose, leurs idées, leurs milieux et pourtant, ils sont unis par une conception semblable de la démocratie. Au cœur de l’assemblée, ces deux orgueilleux se retrouvent face aux mensonges, à la mainmise des intérêts privés, et confrontés aux mépris des Princes à l’égard de ceux qu’ils sont censés représenter. Leurs vies et leurs destins se croisent et se décroisent au fil des soubresauts du pays.
C’est donc son histoire personnelle romancée que nous propose Aurélie Filippetti avec son dernier ouvrage. Elle nous permet de nous plonger au cœur du système politique français, de par son expérience personnelle tout en nous interrogeant sur la possibilité de vivre un amour quand tout semble nous opposer. Une femme de gauche, elle, peut-elle construire une histoire d’amour avec un homme de droite ?
Alors voilà l’idée de nous présenter les rouages de la République sous la forme d’un roman autobiographique est une excellente idée. Superbement écrit, on ne peut pas en dire autrement, on reconnaît assez facilement les principaux personnages du livre, tout en subtilité. Elle nous montre aussi de façon élégante ses engagements politiques, son parcours qui la fut passer d’enseignante à député puis ministre de la culture, ses actions et ses désillusions.
Son analyse du mandat de François Hollande est assez édifiante. Après son entrée au gouvernement, elle nous montre alors sa déception face aux promesses non tenues, ses idéaux qui se perdent au profit de la bourgeoisie, de l’argent et de son confort personnel.
Et puis il y a cette histoire d’amour entre la député de gauche et le député de droite qui se déroule sur dix ans, le temps de deux mandats, celui de Nicolas Sarkozy et celui de François Hollande. Une histoire restée secrète du fait des convictions politiques opposées des deux amants. Une histoire qui prouve que l’on peut vivre avec quelqu’un qui n’a pas les mêmes convictions politiques que soi tant que celles-ci respectent la démocratie et la république.
Avec Les Idéaux, excellent livre politique pour moi, je dois bien avouer que mon point de vue de départ concernant Aurélie Filippetti a bien évolué. En nous montrant parfaitement les difficultés qu’elle a pu rencontrer dans son ministère, on comprend mieux comment il est parfois compliqué de mettre en place ses idéaux tant les obstacles s’avèrent souvent être nombreux. Son livre, c’est un peu le roman de l’échec de la gauche.
Aurélie Filippetti a au moins le mérite d’être d’une grande honnêteté et sincérité dans son ouvrage, ce qui n’est pas toujours le cas de notre classe politique, elle n’hésite pas à nous dire ce qu’elle a sur le cœur.
Et en même temps, elle profite de sa verve littéraire pour nous offrir une analyse politique pleine de finesse sur notre démocratie et un livre qui nous fait réfléchir sur nos représentants politiques.