La
Pinacothèque de Paris poursuit
sa collaboration avec le Rijksmuseum d'Amsterdam
en présentant une sélection d'oeuvres exceptionnelles
de la peinture néerlandaise du 17ème siècle
considérée comme "L'âge
d'or hollandais".
Le sous-titre, "De Rembrandt à Vermeer", annonce
la couleur de cette exposition qui présente un florilège
d'œuvres majeures, des tableaux mais également des
œuvres graphiques et quelques objets d'art, dont les faiences
de Delft, qui attestent de la diversité et de la richesse
de la production picturale de cette époque.
Richesse de style, de registres et de peintres aux noms certainement
totalement inconnus du grand public qui, entre le réalisme
inquiet de Rembrandt, le maître du clair-osbcur, présent
avec plusieurs toiles dont le portrait de son fils Titus et
le symbolisme poétique de Vermeer, avec une seule oeuvre,
l'énigmatique toile "La lettre d'amour" retenue
comme visuel de l'affiche, ont contribué à magnifier
cette période.
L'âge d'or hollandais : une
peinture de l'âme
L'exposition organisée sous la direction artistique
de Marc Restillini, directeur de la
Pinacothèque, et le commissariat de Ruud
Priem du Rijksmuseum d'Amsterdam est une réussite
exceptionnelle car elle présente des toiles d'une beauté
sublime et d'une sensibilité pétrie de spiritualité.
Or cela ne relève pas de l'évidence quand on
rappelle les circonstances socio-historiques dans lesquelles
ses toiles voient le jour. Il s'agit essentiellement d'une peinture
de commande exécutée par des peintres de métier,
qui sont des bourgeois établis, rétribués
par les nouveaux riches que sont les marchands et négociants
enrichis par le commerce maritime d'un petit pays anodin qui
est devenu une puissance commerciale hégémonique
et un centre culturel.
Chargés
d'en exalter les valeurs essentielles, à savoir l'esprit
d'entreprise et l'art de vivre, ainsi que d'immortaliser les
potentats, dont Frans Hals est le portraitiste officiel, tout
en respectant l'iconoclasme calviniste, les peintres vont néanmoins
trouver leur espace de liberté.
Grâce à une technique éprouvée ils
insufflent un supplément d'âme tant dans les paysages
lénifiants que dans les scènes de genre d'une
banalité ordinaire au point où Claudel y voyait
un art chrétien, écrivant "cette image de
dieu qui reposait enfoui sous le quotidien".
Recomposant la lumière et l'espace, ils restituent leur
vision de la réalité et truffent leurs tableaux
de signes allégoriques. Ainsi si pour la minorité
catholique d'Utrecht, la peinture religieuse demeure, les protestants
usent du subterfuge des personnages en prière comme Nicolas
Maes ou des paysages comme Adam Pynacker avec des bateliers
symbolisant la fuite en Egypte. Même les natures mortes
et les vanités rappellent la brièveté et
la vacuité de la vie terrestre.
Alors sacralisation de l'humain et de la condition tragique
de l'homme ou détournement habile du quotidien pour masquer
une sensibilité liturgique, peu importe. Déclinée
en sections thématiques, cette exposition est éblouissante
et prouve que, en ces temps-là, la lumière venait
du Nord. |