Comédie dramatique de Michel Bellier, mise en scène de Johanna Boyé, avec Brigitte Faure (en alternance avec Brigitte Damiens), Anna Mihalcea, Pamela Ravassard et Elisabeth Ventura.

Août 1914 : la guerre est déclarée et comme des milliers d'autres femmes, quatre d'entre elles vont bientôt se retrouver à travailler dans une usine d'armement pour gagner quelques sous.

Julie, Rose, Jeanne et Louise, toutes différentes, vont devoir vivre au quotidien la pression permanente de l'atelier où le risque est constant.

Louise, la journaliste et militante va rendre compte des conditions de travail de ces fabricantes d'obus et découvrir que le verre de lait qui leur est donné chaque jour sert en réalité à éviter l'empoisonnement par poudre de TNT qu'elle manipulent et inhalent en permanence, leur laissant les mains jaunes.

Le texte de Michel Bellier fort bien situé dans le contexte de l'époque crée de l'émotion au fil des jours et de l'amitié qui se noue peu à peu entre ces femmes. Elles que rien ne rassemblait au départ et qui n'auraient dû jamais se rencontrer.

Dans la scénographie impeccable d'Olivier Prost qui représente les murs de l'atelier aux encadrements métalliques et froids, le son lancinant de la cadence infernale produit une oppressante impression.

Dans "Les Filles aux mains jaunes", se retrouvent la mise en scène physique et le talent à orchestrer un groupe de Johanna Boyé bien épaulée par Johan Nus à la chorégraphie. C'est la force du collectif qui donne cette efficacité à l'ensemble.

Avec son équipe artistique habituelle, Cyril Manetta aux lumières délicates, Marion Rebmann pour les costumes parfaits et Mehdi Bourayou pour l'accompagnement musical particulièrement réussi, Johanna Boyé rend poignante cette tranche de vie où les quatres comédiennes sont toutes magnifiques.

Pamela Ravassard est une Louise ardente et libre qui marque de son incroyable présence. La spontanéité d'Anna Mihalcea, éblouissante, fait merveille dans le rôle de Julie. Brigitte Faure régale de sa puissance de jeu et de son ironie. Enfin, Elisabeth Ventura dont l'évolution du personnage est la plus grande est parfaitement bouleversante.

Cette partition sombre distille pourtant une note d'espoir avec la prise de conscience de chacune de se battre pour faire évoluer les conditions de travail des femmes. Et la trajectoire de Rose qui passe de femme au foyer à militante enflammée est à ce titre particulièrement significative.

Tout cela est formidablement bien restitué par la mise en scène brillante de Johanne Boyé qui dirige au cordeau ce quatuor d'exception pour un admirable moment de théâtre.