C’est toujours super chouette d’avoir entre les mains un livre écrit par Arnaud Cathrine. A chaque fois, on sait d’avance que l’on va passer un super moment de lecture. Depuis La disparition de Richard Taylor, que j’avais adoré, je suis de près les publications de cet auteur qui écrit aussi d’excellents livres pour la jeunesse. Je vous recommande particulièrement les ouvrages A la place du cœur qui sont excellents.

Arnaud Cathrine est donc de retour pour cette rentrée littéraire, toujours aux éditions Verticales avec un très beau recueil de nouvelles qui analysent avec brio les sentiments humains. Ce n’est pas nouveau que ce dernier s’embarque sur des histoires de sentiments, c’est un peu tout ce qui est au cœur de ses ouvrages, que ceux-ci parlent d’amour, de sexualité mais aussi d’amitié ou bien encore de trahison.

Ici, au-delà des sentiments racontés et de l’écriture lunimeuse de l’écrivain, c’est la construction de l’ouvrage qui se démarque par son originalité. Autour de nouvelles très actuelles, l’auteur a fait le choix d’y introduire des textes plus anciens, venant du début du siècle avec des conversations ou des échanges d’écrivains et d’artistes anciens.

Une comédienne, de nos jours, décide de ne plus jouer le jeu en se retirant de la société. Jean Cocteau, dans les années 20, se débat avec sa passion pour Raymond Radiguet. Un adolescent traque avec fébrilité sa première fois lors d’un été à Berck et affronte l’insoupçonné en lui. Annemarie Schwarzenbach se sent écartelée entre ses désirs d’Orient et le devoir de lutter dans une Europe séduite par le fascisme. Un jeune homme s'éprend d’une femme qui dit avoir renoncé à l’amour.

Quel bonheur de retrouver Jean Cocteau en vacances au Piquey, d’arpenter la villa E-1027 avec sa vue sur Monaco, l’occasion pour Eileen Gray de se souvenir de sa relation avec Badovici ! Arnaud Cathrine rassemble aussi Drieu La Rochelle (connue pour sa collaboration lors de la Seconde Guerre mondiale, une période qui plane tout au long de l’ouvrage) et Jacques Rigault (l’un de ses amis artistes).

L’ouvrage est constitué de onze nouvelles, de onze personnages réels ou imaginaires avec des titres qui commencent toutes par "je". "Je n’existe plus", "je n’ai pas besoin d’amour", "je ne fais que passer" ou encore "Je m’inquiète pour Chopin". Ces onze personnages, à l’aube de deux siècles, le 20ème et le nôtre, tentent d’empoigner leur liberté. Rien de la déliquescence d’une fin de siècles mais, bien au contraire, des lignes de vie, des désirs d’émancipation, un parfum de commencement du monde. D’un monde à soi.

L’ouvrage se termine sur un superbe texte, autour d’un ancien élève de Roland Barthes, qui à l’aune de la vieillesse, reçoit un jeune homme, Marceau, âgé de 23 ans, influenceur sur les réseaux, dont il tombe amoureux.

Subtil et toujours superbement écrit, Début de siècles se déguste comme un bon met, plongeant le lecteur dans l’univers de ses personnages de deux temps, de deux siècles que l’auteur traite avec une très belle tendresse, une pointe d’humour et beaucoup d’empathie. C’est un superbe livre.