Réalisé par Julien Gaspar-Oliveri. France. Drame. 52 minutes (Sortie le 30 août 2017). Avec Carole Franck, Lucie Debay, Benjamin Sikso, Souad Amidou et Riton Liebman.
De nombreux cinéastes,comme Julien Gaspar-Oliveri influencés par Maurice Pialat et John Cassavetes, n'auraient pas hésité à étirer "Villeperdue" pour en faire un long métrage. Le spectateur n'y aurait vu que du feu et les impétrants auraient ainsi franchi le cap du "premier film" plus vite.
Il faut donc féliciter Julien Gaspar-Oliveri d'avoir choisi la bonne solution pour donner à cette tranche de vie entre une mère et ses deux grands enfants la juste distance.
Pas besoin d'être un exégète très savant pour comprendre que cette "ville perdue" est pour Lucie Debay et Benjamin Siksou celle de leur enfance achevée, une enfance pas terrible dont il ne reste pas beaucoup de souvenirs heureux. En plus, la fille et le fils de Carole Franck sont comme chat et chien. Il ne faudra d'ailleurs guère de temps pour que reviennent les chamailleries alimentées par de vieilles aigreurs.
Mais dans toute vie, même celle qui paraît la moins réussie, il y a eu des instants de bonheur, de complicité, voire d'amour. C'est ce qui va finir par rejaillir ici, par brides, par fragments.
Pourtant, ce qu'il y a de pire quand on revient dans son passé, c'est quand on le retrouve pour le perdre... La mère en a fini avec sa solitude et ses enfants vont découvrir quelque chose qu'ils n'avaient pas prévu : elle peut, elle va refaire sa vie...
"Villeperdue" de Julien Gaspar-Oliveri est une œuvre pleine de promesse, qui se joue de l'époque et n'en a cure de s'accrocher à un cinéma qu'on croyait sans descendance.
On a parlé de Cassavetes, de Pialat. C'est tout un cinéma naturaliste, aimant les gens et les mettant au centre de ses préoccupations qui se réveille dans ces cinquante minutes très peuplées où chaque plan apporte un point de vue nouveau sur ce trio qui s'aime et se déchire, qui reste sauvage, mais qui est peut-être décrit au moment d'un certain apaisement.
On félicitera Julien Gaspar-Oliveri pour le choix d'un casting impeccable et pour une direction d'acteurs remarquable. Il a su éviter tout monolithisme dans ces trois personnages principaux, ne les a pas poussés vers une hystérie inutile. On croit aussitôt en eux et, jamais, leurs relations ne semblent artificielles.
Le réalisateur a su aussi donner de la vie à leur entourage. On sera ainsi heureux de revoir Souad Amidou et plus encore, on appréciera la prestation pas facile de Riton Liebman (celui de l'admirable "Liebman renégat") en "beau-père" au surgissement imprévu.
"Villeperdue" de Julien Gaspar-Oliveri, comme on l'a dit, vaut largement un long-métrage. Il annonce sans doute un cinéaste.
"Villeperdue" est projeté avec "Passe", un précédent court-métrage de douze minutes de Julien Gaspar-Oliveri) |