L’essence du mal, publié aux éditions Denoël, est le premier roman de Luca d’Andrea, considéré comme le petit génie du polar en Italie. L’histoire se passe sur deux périodes. En 1985, dans les montagnes hostiles du Tyrol du sud, trois jeunes personnes sont retrouvées mortes, littéralement charcutées pendant une tempête, leurs corps tellement mutilés que la police n’a pu déterminer à l’époque si le massacre était l’œuvre d’un humain ou d’un animal.
Depuis, on se transmet de génération en génération cette histoire macabre. Trente ans plus tard, Jeremiah Salinger, réalisateur américain de documentaires marié à une femme de la région entend cette histoire et décide, après un accident d’hélicoptère qui a failli lui coûter la vie, de partir à la recherche de la vérité.
Dans le petit village où il s’installe, les habitants font tout, parfois de manières menaçantes, pour que les recherches soient abandonnées. Même sa femme, inquiète pour sa sécurité et celle de sa fille, même son beau-père, celui qui a découvert les trois cadavres à l’époque, font tout pour le dissuader de continuer son enquête. Le triple meurtre est comme porteur d’une malédiction, comme si une force meurtrière qu’on pensait disparue s’était réveillée.
Ce livre, c’est bien simple, on ne le lit pas ! On l’avale, on le dévore. Juste deux jours pour ma part. On est happé dès le début par cette histoire hors norme puis l’écrivain a le talent pour faire monter la tension au fil des pages. Les pages défilent, on ne lâche plus le bouquin et on se régale.
Le personnage de Jéremiah Salinger est parfaitement écrit. Tourmenté par l’accident qu’il a subi, se sentant responsable de la mort des secouristes qui étaient avec lui, il va chercher sa rédemption dans l’enquête sur ces trois jeunes morts auparavant.
Les autres personnages sont aussi très travaillés par l’auteur. La femme de Jéremiah, son collègue Mike, son beau-père et sa fille mais surtout le shérif du village, qui reste aussi traumatisé par ce massacre. Salinger enquête, il piétine parfois, fait fausse route aussi, il entre en période de réflexion souvent, fait des pauses aussi (pour faire plaisir à sa femme qui souhaiterait qu’il arrête son enquête). Il enquête parfois en cachette, toujours à cause de sa femme. Salinger se trompe parfois et cela le met en danger. Et nous, lecteur, on l’accompagne dans sa recherche, avec l’envie qu’il découvre la vérité, avec aussi souvent des doutes qui naissent en nous sur certains personnages. On s’inquiète pour le personnage de Jérémiah, on s’inquiète aussi pour son couple qui se délite à mesure que l’enquête avance.
Dans ses dolomites, l’auteur construit une ambiance pesante pour donner encore plus de poids à son thriller et cela fonctionne parfaitement bien. Tout est parfaitement construit avec brio par Luca d’Andrea. Les incohérences, que l’on peut parfois trouver même dans d’excellents polars sont ici inexistantes. Il est en plus, à mon avis, quasi impossible de trouver avant la fin le dénouement de l’histoire.
Avec ce premier polar, on peut donc dire que Luca d’Andrea vient de frapper un très grand coup. L’essence du mal est un excellent polar, un livre passionnant, à l’univers glaçant que je vous conseille vivement de lire. |