Comédie dramatique de Mohamed Kacimi, mise en scène de Hajri Gachouch, avec Selin Altiparmak, Marion Begoc, Hajri Gachouch, Maxime Retiers et Ezequiel Volpe.
On comprend très vite que "Terre Sainte" a pour vocation de rappeler la situation d'un peuple qui connaît l'occupation et l'oppression. Sans jamais être cité, on sait donc qu'on est au cœur de la matrice de tous les conflits moyen-orientaux, le "conflit israélo-palestinien". Ce que décrit Mohamed Kacimi, avec une espèce de retenue rageuse qui finit en apocalypse des corps et des âmes, est un tissu de noirceur, un inextricable labyrinthe de haine qui rend tout le monde déraisonnable au nom de la patrie, au nom de l'honneur, et même au nom de l'humain et de ses divinités. Rien de nouveau sous le soleil chaud et oppressant. Chacune des scènes imaginées par Mohamed Kacimi est une figure de style si connue qu'elle paraît épuisée. Pourtant, cette répétition qui mène à l'épuisement général est réelle et nécessaire.
Pétrie de symboles, "Terre Sainte" pourrait sombrer dans les clichés et les redites, mais la mise en scène de Hajri Gachouch, et le soin apporté au décor comme aux tenues des cinq protagonistes, qui en font déjà quelque part les détenus d'une prison à ciel ouvert, aplanissent les angles.
Au contraire, de nombreuses scènes attendues, comme celles avec le soldat ennemi, sont sauvées par la force de l'interprétation d'une distribution de grande qualité. Théâtre politique, voire militant, "Terre Sainte" ne tombe pas dans le piège du simple constat manichéen. S'il n'y a pas d'ouverture vers un ailleurs où l'herbe serait plus verte et l'avenir enfin dégagé, le désespoir décrit l'est avec une grande puissance qui finit par constituer l'espoir même. Si l'on est encore capable de montrer une situation aussi désespérée sans sombrer dans la lamentation et l'amertume, c'est qu'on est encore capable de survivre et d'avoir l'énergie de se reconstruire inlassablement quoi qu'il en coûte de cris et de larmes. "Terre Sainte" ne convaincra peut-être que des convaincus parce que les autres ne viendront pas. C'est dommage car ils auraient vu dans la pièce de Mohamed Kacimi, telle qu'elle est montée par Hajri Gachouch, une réflexion qui englobe et concerne les uns et les autres, c'est-à-dire tous ceux dont le destin est infiniment lié sur cette terre qui ferait mieux de ne plus avoir la prétention d'être "sainte" pour pouvoir vivre sinon en harmonie, du moins en paix et en tranquillité. Mention à toute la distribution, Selin Altiparmak, Marion Begoc, Hajri Gachouch, Maxime Retiers et Ezequiel Volpe, qui n'est jamais dans la caricature ni l'hystérie et qui joue en conscience cet exposé d'une situation figée dans l'injustice. |