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puce Oasis ou la revanche des ploucs
Benjamin Durand & Nico Prat  (Editions Playlist Society)  mai 2021

Voilà un ouvrage que j’avais particulièrement envie de lire, non pas que je sois un grand fan du groupe Oasis, mais parce que l’entrelacement entre l’histoire de ce groupe et celle de la politique anglaise m’intéresse fortement.

Une fois encore, c’est l’excellent éditeur Playlist Society qui nous propose cet essai, avec ici une double plume, celle de Benjamin Durand, documentaliste d’archives audiovisuelles et historien de formation qui a vécu dix ans en Angleterre, essentiellement à Manchester et la plume de Nico Prat, journaliste culturel qui écrit sur le cinéma et la musique.

Le concept est toujours le même, nous proposer un ouvrage d’un peu plus de 120 pages, qui se lit le temps d’un court après-midi, un essai passionnant sur un groupe qui quoi qu’on le dise aura marqué l’histoire de l’Angleterre.

Car oui, derrière les tubes des années 90, certains étant devenus des hymnes ("Wonderwall", "Supersonic" ou "Don’t look back in anger") et les frasques des frères Gallagher, réputés pour leur arrogance et leur tendance à l’auto sabordage, Oasis est avant tout un groupe qui a marqué l’histoire de l’Angleterre, aussi bien pour son impact sur la britpop, réponse anglaise au mouvement grunge de l’époque, que pour ce qu’il a représenté pour toute une génération.

Mais Oasis, c’est aussi un groupe issu de la classe ouvrière anglaise déshéritée de Manchester, marquée par la délinquance et le chômage. Les membres du groupe auront symbolisé le passage de l’inconsidération à la starification pour une jeunesse abandonnée par le thatchérisme, faisant d’Oasis une aventure tout autant musicale que sociale et politique.

Oasis, c’est d’abord une histoire de famille, celle d’une famille déchirée, marquée par la rupture brutale des parents et par une fratrie, autour de trois frères, Paul, Noel et Liam. On apprend de nombreuses choses sur l’enfance des frères Gallagher, mais aussi sur l’importance des figures paternelles dans leur évolution. Il y a d’abord, leur vrai père, dont le comportement expliquera en partie les tensions entre les deux frères. On se souvient que le groupe se sépara un soir de 2009 avant un concert à Rock en Seine, suite à une nouvelle bagarre entre les deux frères. Il y a aussi les pères de substitution, les pères fondateurs, Lennon et Mc Cartney mais aussi les pères influenceurs comme Paul Weller, proche de Noel, artiste qui vient tout juste de sortir un superbe album.

L’ouvrage nous parle aussi des tensions entre Noel et Liam. Noel écrit, Liam interprète. Les deux ont eu une vie sentimentale tumultueuse, un peu plus sinueuse quand même pour Liam. Dire que les deux frères forment un duo soudé est une hérésie, ils se contentent pourtant de fédérer la nation autour de leurs textes et leurs mélodies dans des immenses concerts à ciel ouvert devant des foules compactes acquises à leur cause. Noel Gallagher n’accorde que peu d’intérêt aux paroles des chansons qu’il écrit qui pour lui ne servent qu’à être entonnées par la foule. "Don’t look back in Anger" en est le parfait exemple, le titre étant devenu particulièrement fédérateur après l’attentat de Manchester lors d’un concert d’Ariana Grande en 2017 qui fit 23 morts.

Dans un deuxième temps, l’ouvrage prend une dimension politique, celle qui m’intéresse. Liam et Noel ont grandi sous Thatcher le plus nous parlant de l’Angleterre de Margaret Thatcher. L’ouvrage nous montre comment Noel et Liam sont imbibés de l’héritage idéologique des années Thatcher que du sentiment de revanche de la classe ouvrière qu’il a inspiré.

Oasis c’est aussi l’histoire de Manchester, une ville qui dans les années 80 tente de trouver une alternative à la désindustrialisation tente d’attirer plus d’étudiants pour les former et dynamiser l’économie locale. Des jeunes venus des quatre coins de l’Angleterre déboulent, une mixité se crée entre jeunes éduqués et chômeurs désabusés. Une mixité présente dans le centre quand la banlieue est toujours dominée par la culture prolo. Oasis va se retrouver le porte-étendard de cette jeunesse désabusée laissée à l’abandon, orpheline de la culture ouvrière, qui a souffert sous Thatcher. Manchester et sa musique alternative va s’opposer à Londres et sa musique bourgeoise et branchée.

Le début des années 90 marque la fin du thatchérisme, l’arrivée au pouvoir de John Major mais aussi la déferlante du grunge avec Nirvana notamment. Après la mort de Kurt Cobain, la britpop va s’empresser d’essayer de combler le vide. Oasis, Blur et Supergrass sont mis en avant autour d’une identité anglaise qui renaît. Le cinéma anglais accompagne ce renouvellement culturel avec Quatre mariages et un enterrement et Trainspotting. Tony Blair prend le pouvoir, sans renier le bilan de Thatcher, en insérant dans sa politique de la justice sociale. Oasis va devenir l’équivalent musical de la politique de Tony Blair, qui va inviter Noel Gallagher au 10 Downing street, ce qu’on peut qualifier de revanche des ploucs, d’où le titre du livre. Le livre nous dévoile des anecdotes savoureuses sur ce passage chez le premier ministre.

Dans un dernier temps, l’ouvrage nous parle des racines irlandaises d’Oasis. La famille Gallagher est issue de la diaspora irlandaise, majoritairement catholique qui s’est installé à Manchester. Les membres d’Oasis ont un accent particulier (qui va leur jouer des tours aux Etats-Unis) et revendiquent leurs racines mancuniennes notamment au travers du foot en supportant Manchester City, un club qui dans les années 90 vit dans l’ombre de son rival Manchester United qui domine le foot anglais. Oasis incarne la culture laborieuse du nord et va s’opposer à l’élite londonienne autour de Blur. Une nouvelle rivalité s’expose, la bataille de la Britpop, les ploucs contre les classes moyennes, Londres contre Manchester.

Alors voilà, cet ouvrage sur Oasis s’est avéré être passionnant du début à la fin. Formidablement écrit et formidablement documenté, il m’a permis d’apprendre de nombreuses choses sur ce groupe et son histoire. Ce livre est juste génial. Tout simplement.

 

En savoir plus :
Le Facebook de Nico Prat
Le Facebook de Benjamin Durand


Jean-Louis Zuccolini         
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